Le 18 novembre 2020, notre bureau publiait un sommaire du projet de loi no 59, soit la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (projet de loi). Tel que nous l’expliquions, le projet de loi prévoit des modifications réellement majeures au régime actuel de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) ainsi qu’à celui de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST). Nous faisions alors le constat que le projet de loi prévoit, malheureusement, de nets reculs pour les employeurs en matière de droits de gestion et de financement. 

Voilà qu’au courant du mois de mars 2021, dans le cadre des travaux parlementaires, le ministre du Travail a déposé une série de propositions d’amendements au projet de loi. Les amendements essentiels à connaître pour les employeurs sont résumés ci-dessous. 


Régime de financement

Un des amendements proposés a pour effet d’annuler la modification prévue à l’article 329 de la LATMP, laquelle a été vivement critiquée par les employeurs et avocats patronaux. En bref, l’article 329 de la LATMP permet un partage des coûts dans le cas d’un travailleur déjà handicapé lorsque se manifeste la lésion professionnelle. Rappelons que le projet de loi était extrêmement sévère à l’égard du handicap requis et prévoyait que l’article s’appliquerait désormais uniquement lorsque le travailleur présenterait, préalablement à la lésion, « une déficience entraînant une incapacité significative et persistante et […] est sujet à rencontrer des obstacles dans l’accomplissement d’activités courantes ». La portée de l’article 329 était ainsi réduite à une proportion infime des travailleurs du Québec, et ce, étant donné le niveau de handicap requis en vertu du projet de loi. Il est donc rassurant que le ministre du Travail propose le retrait de la modification qui était initialement prévue au projet de loi. 

Maladies professionnelles

Tel qu’il était résumé dans notre première publication, le projet de loi édicte le Règlement sur les maladies professionnelles, où se retrouvent désormais les maladies professionnelles. Ce règlement prévoit ainsi essentiellement des présomptions pour certains types de maladies professionnelles, ce qui allège la preuve des travailleurs qui demandent à être indemnisés en lien avec celles-ci. Parmi les amendements, le ministre propose maintenant l’ajout, à la liste des maladies professionnelles, de la maladie de Parkinson provoquée par l’exposition aux pesticides.

De plus, le ministre propose un amendement visant les maladies professionnelles musculo-squelettiques liées aux mouvement répétitifs (bursite, tendinite, ténosynovite). En effet, alors que le projet de loi contenait une nouvelle définition pour ce type de maladies professionnelles, le ministre propose de revenir à la définition usuelle telle qu’on la retrouve dans la LATMP.

Réadaptation professionnelle

Le projet de loi prévoit que lorsqu’un travailleur est incapable d’exercer l’emploi qu’il occupait avant sa lésion professionnelle, ou un emploi équivalent, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) détermine s’il existe un emploi convenable disponible chez l’employeur. Cet exercice est mené par la CNESST en évaluant notamment si des mesures de réadaptation sont requises pour permettre au travailleur d’exercer un tel emploi. Dans le cadre des amendements au projet de loi, le ministre du travail propose de préciser que la détermination de l’emploi convenable doit se faire avec la collaboration de l’employeur ainsi que celle du travailleur.

LSST

Au plan de la LSST, tel qu’il est résumé dans notre première publication, le projet de loi étend l’application des mécanismes de prévention et de participation des travailleurs à tous les secteurs d’activité, et ce, en fonction de la taille des établissements et du niveau de risque des activités qui y sont exercées. 

Dans le cadre des amendements proposés, le ministre du Travail retire du projet de loi la notion de risque, pour ne conserver que le critère de la taille des entreprises (nombre de travailleurs). 

Plan d’action

En outre, le ministre propose que lorsqu’aucun programme de prévention ne doit être élaboré ou mis en application pour un établissement, l’employeur doit mettre en œuvre un plan d’action propre à cet établissement. Un tel plan d’action inclut : l’identification des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, les mesures permettant d’éliminer ou de contrôler les risques, les mesures de surveillance et d’entretien permettant de s’assurer que les risques identifiés sont éliminés ou contrôlés, l’identification des moyens et des équipements de protection individuels ainsi que la formation et l’information fournies aux travailleurs en matière de santé et de sécurité du travail.

Télétravail

Parmi les amendements proposés, on retrouve également une disposition à l’effet que la LSST s’applique au télétravail, et ce, « sous réserve de toute disposition inconciliable » de la loi. À noter qu’à l’exception de règles concernant la visite des inspecteurs de la CNESST dans une maison d’habitation, les amendements n’apportent aucune précision sur les règles applicables en matière de télétravail. Il appartiendra donc à nos tribunaux de trancher ces questions telles les obligations des employeurs et des travailleurs en matière de télétravail. Nous vous invitons à communiquer avec nous pour plus de détails sur le sujet.

Situation de violence

Enfin, rappelons que le projet de loi modifie l’article 51 de la LSST (obligations générales de l’employeur) pour y prévoir des mesures assurant la protection du travailleur exposé sur les lieux de travail à une situation de violence conjugale ou familiale. Les amendements proposés par le ministre viennent ajouter la situation de violence à caractère sexuel. Tel qu’il est mentionné précédemment, les travaux parlementaires en cours (dont les transcriptions sont à venir) pourront, espérons-le, clarifier les situations précises visées par cet ajout à la LSST ainsi que circonscrire les mesures permettant aux employeurs de satisfaire à cette nouvelle obligation. 

Nous continuerons de vous tenir informés de l’évolution du projet de loi, lequel fera sans doute l’objet de nouvelles modifications dans le cadre des travaux parlementaires.



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